lundi 30 octobre 2017

Review : Le Projet Belliciste Tome 1 de Thierry Lawrence Bernard

Dernièrement, j’ai eu la chance découvrir un auteur de SF sur Facebook. Nous nous sommes rencontrés au hasard d’une discussion sur les maisons d’édition et il me disait rencontrer des difficultés avec son « Projet Belliciste ». Après plusieurs échanges, il me propose de lire son livre, histoire de voir si je lui trouve quelque chose de choquant ou de dérangeant. Oh pétard… La claque de ouf que je me suis prise.







Ambiance : L’ambiance de ce roman est très soignée. En SF, c’est toujours plus compliqué de décrire les bâtiments d’habitation ou de guerre. Surtout quand ceux-ci sont en orbite autour d’une planète et issus d’une technologie non humaine. Trop souvent, les aliens sont traités de façon manichéenne et caricaturale. Ce n’est pas le cas ici, même si on a à faire à des « gris » (ce ne sont pas les aliens les plus originaux, on est d’accord), leur civilisation, leur technologie et leur croyances religieuses sont dépeintes avec minutie et réalisme. Rien n’est laissé au hasard. Mais la grande originalité de ce roman, c’est la façon dont est traitée l’humanité. +1

Personnage : C’est le premier roman SF que je lis, où il n’y a pas d’hommes. Du moins, d’humains masculins. Au début ça faisait bizarre, les trois quarts des adjectifs, des noms et des pronoms sont accordés au féminin. D’habitude le nombre personnages féminins est toujours inférieur à celui des hommes, de plus elles sont souvent reléguées à des rôles secondaires. Avec ce roman, j’ai été bien servie. C’est une galerie de portraits féminins réalistes. Les « Bellicistes » comme elles sont nommées, sont soit des soldates, soit des génitrices contraintes de pondre des futures soldates. Alors dit comme ça, ça peut faire gros délire de mecs sadiques, mais ce serait porter un jugement hâtif. Le regard que porte le narrateur sur les souffrances de ces femmes est compatissant et respectueux. Même lorsqu’elles subissent des tortures, mêmes lorsque leurs corps volent en charpie dans les explosions des champs de bataille, elles sont époustouflantes et admirables.  Une fois qu’on sait que l’auteur est un homme engagé contre la prostitution de rue et les trafics d’humains, ça change la donne. En gros, dans ce roman, la rue est remplacée par la guerre. La psychologie des personnages et leurs comportements post traumatiques sont ahurissants de réalisme. Ajoutez à ça, une très bonne retranscription de ce qu’est le milieu militaire, l’armée, c’est +1 direct.

Les bellicistes me rappellent mes héroïnes préférées, ici lorsque Kusanagi de Ghost in the Shell 
essaie d'ouvrir la trappe d'un tank à mains nues...

Intrigue : C’est là que ce roman déballe l’artillerie lourde. Le roman évolue dans un univers militaire, en gros, les thaumaturges (nos aliens gris) ont réduit l’humanité en esclavage et il s’en serve comme chair à canon pour soumettre les autres civilisations de la galaxie. Tout est passé au crible. Politique, fanatisme, éthique… L’intrigue est riche et pourtant claire et accessible. Les scènes d’action sont magistrales ! Bon sang j’en avais la chair de poule et la bouche remplie de bave ! Que ce soit les scènes de batailles spatiales ou sur sol ! Du space opéra qui poutre Starwars et fait passer les batailles de The Edge Of Tomorrow pour des comptines. Imaginez la scène de débarquement du soldat Ryan avec des supers soldates boostées à la technologie alien ! C’est du putain de grand art.   +1

Ecriture : L’auteur est autodidacte. Dans le sens où il n’a pas fait de grandes études littéraires ou autre. Et ben ça poutre tout autant. Le ton est juste, le vocabulaire si riche que j’ai dû solliciter mon ami google plusieurs fois. Les scènes intimes sont sensuelles et pudiques. Les scènes d’action… Sont à couper le souffle. Le petit plus, c’est l’emploi de quelques mots ou expressions québécoises, mais rien d’incompréhensible pour des franco-français. Etant créole, j’ai trouvé amusant de découvrir les expressions d’un autre pays francophone. +1

Mon ressenti : Je n’ai pas ressenti une telle claque depuis La Stratégie Ender d'Orson Scott Card et la première série Gunnm de Yukito Kishiro . LEs bellicistes sont de la même trempe que Gally et Kusanagui (Ghost in the Shell). J’aime que la SF mêle l’action et les émotions. Ça change drastiquement des clichés du genre. Quand j’ai refermé le livre, je n’avais qu’une envie, retourner me battre dans l’espace auprès des bellicistes. Chanter leur complainte, suer sang et eau, tomber, se relever, mourir pour accomplir « l’Héritage » ! +1

C’est un 5/5 en ce qui me concerne.

Et la suite c’est quand tu veux M. Thierry Lawrence Bernard.

5 commentaires:

  1. Ouah, c'est toi qui me met la bave dans la bouche avec une telle chronique *___*

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    1. Tu me connais, je dis toujours le fond de ma pensée! Ce roman m'a bluffé. Je ne comprends pas qu'il ne trouve pas de maison d'édition, c'est très original pour de la SF. Je suis sûre que si les gonzesses combattaient en string le livre aurait trouvé direct un éditeur xD !!!! Manque de bol, c'est des badass à moitié gueules-cassées xD !

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  2. Je l'ai lu aussi et ta critique est absolument parfaite :) Quel roman!

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  3. On est d'accord ^^. J'aimerai trop le voir adapté à l'écran avec des vraies actrices badass ! Et pas comme ils ont fait avec Ghost in the Shell en nous mettant une biscotte dans le rôle de Kusanagi -_-.

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  4. Merci beaucoup pour vos bons mots. Les critiques sont la seule véritable récompense valorisante, puisque les mauvaises me permettent d’évoluer comme auteur et les bonnes, elles me réconfortent pour le travail que j’ai accompli. Vaisey Simétra est d’une certaine façon ma cinquième fille ou ma meilleure amie, je ne sais pas comment expliquer notre relation de personnage/auteur. Elle m’habite depuis les années quatre-vingt et insiste beaucoup pour exister. La trame de fond de cette série est la survivance d’une personne face à l’horreur de la manipulation, de la guerre, de la violence psychologique et physique. La quête de l’humanité est très présente dans les trois tomes du Projet belliciste, autant par la lieutenante Vaisey Simétra que par tous les autres personnages. Les trois tomes sont très différents l’un de l’autre. Chacun a son atmosphère bien à lui, car elle suit l’évolution spirituelle des personnages.

    J’ai voulu les Bellicistes fortes, diversifiées et qu’elles sortent de ce fantasme promulgué par la culture américaine sur les femmes. Les Bellicistes représentent celles qui ont pris les armes pour défendre une cause. On les retrouve dans la littérature révolutionnaire, dans les Européennes qui ont lutté contre les NAZIS et dans toutes celles qui ont lutté. Dans mes lecteurs critiques, j’ai pris soin d’inclure des féministes et des survivantes de l’exploitation sexuelle ainsi que de la violence pour, justement, éviter le piège d’une image avilissante, dégradante de la femme. L’idée est d’avoir des personnages féminins qui ne sont pas de simples « fantasmes de gars », mais qui représentent des survivantes. Le côté « stress post-traumatique » est présent. Je voulais sortir de la représentation de « la pauvre victime ». Mes personnages sont debout en étant conscients d’êtres souffrants. Et surtout, je voulais casser le moule de ce héros, sans peur et sans reproche, qui tue des gens toute la journée, baise la belle du soir et se lève le matin, sans même avoir perdu sa coiffure parfaite. C’est aussi un univers militaire, donc, dégradant pour tout le monde (homme, femme, enfant).

    La culture de l’endoctrinement des Forces bellicistes m’a demandé beaucoup de réflexion. Mais l’avantage de vivre dans un pays d’immigration, c’est qu’il y a des immigrants. Donc, énormément de témoignages de réfugiés qui ont vécu et vu des situations abominables. Les Bellicistes sont imprégnées de ces témoignages. Je me suis aussi renseigné sur les comportements des détenues dans nos prisons modernes, tout comme de ceux des prisonnières dans les divers camps de rééducations, de travaux forcés, goulag, etc. Je sais que cela fait un texte « assez réaliste », c’est surement le principal problème pour les éditeurs de publier mon texte. Mais pour moi, la Science-Fiction est un genre que j’adore et particulièrement parce qu’il permet de parodier la réalité, sans pour autant tomber dans l’humour ou la dénonciation ouverte. George Orwell est l’auteur qui m’a le plus frappé sur ce sujet. Frank Herbert aussi, dans la mesure où je crois que Dune décriait le totalitarisme et de façon surprenante, si on regarde les « grandes maisons financières » d’aujourd’hui. De mon côté, j’ai développé le Projet pour dénoncer le concept de l’être humain pratique et utile, « l’outil ».

    Merci beaucoup d’avoir pris le temps de me lire et pour vos commentaires qui, je l’avoue, mon réconforté.

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